Décryptage de la semaine
Ce vendredi 13, O’Parleur a la scoumoune mais pas de panique : il s’agit uniquement du décryptage du jour. Alors, on remballe les superstitions et on saisit la chance (!) de découvrir le fin mot de l’histoire.
L’enquête (se) corse
Contre toute attente, le mot du jour nous entraîne en Méditerranée et plus précisément sous le soleil corse.

En effet, Scoumoune ou Schkoumoune, nom féminin, attesté en 1941 (mais usité depuis 1930 au moins en français d’Algérie), vient du corse scomun. Scomun descend lui-même de l’italien scomunicare, d’après le bas latin excommunicare qui signifie « excommunier ».

Mot qui prend tout son sens au Moyen-Âge. À cette époque, en France, fille aînée de l’Église, on réserve ce châtiment aux hérétiques et à quiconque commet un sacrilège envers la religion et/ou ses représentants sur terre. On bannit alors ces « infortunés » de la communauté chrétienne. L’excommunication est donc la disgrâce ultime.

À noter : on relève en ancien provençal escomengar et en provençal moderne escoumenia pour « maudire ».
Fly me to the scoumoune ♫
Ce mot argotique se répand en France en deux temps :
- D’abord via les immigrés napolitains du Vieux-Port de Marseille, dans le quartier Saint-Jean, dès la fin du XIXe siècle.
- Puis en 1950, avec les pieds-noirs d’Algérie et les corses installés à Marseille.
Le terme signifie « malchance », « mauvais sort ».[1] Ce qui ne l’empêche pas de rencontrer le succès, d’abord en littérature en 1958, avec le roman L’Excommunié, de José Giovanni. En 1972, l’auteur adapte son propre roman au cinéma[2] sous le titre de… La Scoumoune, avec Jean-Paul Belmondo, Claudia Cardinale et Michel Constantin[3]. Et à chaque fois, le succès est au rendez-vous. Qui a dit que la scoumoune portait la poisse ?
Certainement pas nous, puisque nous vous souhaitons un excellent week-end !
Hannibal LECTEUR, a une gueule de porte-bonheur
En bonus : l’inoubliable musique de La Scoumoune ♫ par François de Roubaix (1972) :
Notes et références – Scoumoune
[1] Source : LE ROBERT, Dictionnaire historique de la langue française.
[2] Mais ce n’est pas le seul fait d’arme de José Giovanni au cinéma. Nous lui devons aussi la réalisation de Deux hommes dans la ville (1973), du Ruffian (1983) ou encore la co-écriture du scénario du Clan des Siciliens (1969).
[3] L’excommunié, est adapté une première fois au cinéma par Jean Becker en 1961 sous le titre Un nommé La Rocca. Jean-Paul Belmondo y tient déjà le rôle de Roberto et Michel Constantin y apparaît également… mais dans le rôle d’un truand américain. Bien que dialoguiste sur le film, José Giovanni n’est pas satisfait du résultat et tourne ensuite sa propre adaptation.
Retrouvez notre précédent Décryptage → Sur les chapeaux de roues